Depuis quelques mois nous déplorons lors de nos sorties du jeudi ou du dimanche des chutes entraînant des blessures et/ou des dommages matériels sur les vélos. L’origine de ces évènements est la plupart du temps une manœuvre mal maîtrisée, une maladresse, un manque de concentration et d’anticipation, une alerte sur un danger mal transmise…
La question de la responsabilité est posée ? Dans quelles conditions peut-on se faire rembourser de la détérioration de son vélo ? Qui doit payer ?
Nous avons demandé à un spécialiste de l’assurance Dominique B de nous éclairer sur ces questions.
ESA cyclo : tout d’abord quelles sont les obligations du club en matière de responsabilité civile et d’assurance ?
Dominique : l’adhésion au club entraîne obligatoirement (sauf cas particulier) la délivrance d’une licence qui inclut à titre individuel une garantie de responsabilité civile (ou plus simplement la garantie des dommages que l’on peut causer à des tiers) lors de la pratique de notre sport. Le club a souscrit pour lui-même une garantie de responsabilité civile pour se prémunir d’un dommage causé de son fait à ses propres adhérents ou à d’autres personnes : manquement à la prudence, défaut d’organisation caractérisé… Dans tous ces cas, la victime peut donc se faire indemniser de son préjudice.
ESA cyclo : est-ce que les principes que tu viens d’évoquer sont valables pour nos sorties du dimanche et du jeudi ?
Dominique : ce serait trop simple ! Lorsque nous roulons ensemble lors de nos sorties club et qu’une chute ou accrochage se produit au sein du groupe, il y a en principe acceptation du risque. Rechercher la responsabilité de celui qui a été à l’origine de la chute ou de l’écart devient de ce fait très difficile à établir sous réserve de l’évolution de la jurisprudence en matière sportive.
ESA cyclo : mais c’est assez injuste comme système ?
Dominique : « La loi est dure mais c’est la loi ». Pour être encore plus précis voilà ce que ça donne en langage juridique :
- Première règle : chaque licencié est responsable pénalement de ses actes vis-à-vis des autres membres sur la base des articles 1382 et 1383 du code s’il commet une faute intentionnelle ou non intentionnelle et peut donc être sanctionné par rapport à la loi. (exemple extrême : bagarre entraînant des blessures ou encore un cyclo qui pousse volontairement un autre cycliste avec l’intention de nuire en entraînant sa chute). Que ce soit une faute intentionnelle ou non intentionnelle, il appartient dans ce cas la à la victime de prouver la faute de l’auteur pour obtenir réparation de ses dommages. Cela suppose le plus souvent un dépôt de plainte, le recueil de témoignages (indispensables ou infractions relevées par autorité de police).
- Deuxième règle : chaque licencié est responsable civilement vis-à-vis des tiers par rapport aux choses dont il a la garde par application de l’article 1384 alinéa 1 du code civil. Il s’agit en l’occurrence du vélo dont il a l’usage la garde et la conduite. Dans ce cas il est responsable de plein droit des dommages causés à autrui mais il peut s’exonérer en cas de force majeure, fait d’un tiers ou faute de la victime (par exemple non respect des distances de sécurité et défaut de maîtrise de son vélo)
ESA cyclo : en clair, un cyclo victime d’une chute, à la suite d’une fausse manœuvre, ne peut pas prétendre se faire rembourser de ses dégâts ?
Dominique : il est difficile de répondre car chaque événement doit être analysé en fonction des circonstances dans lequel survient l’événement dommageable. Mais compte tenu du principe « d’acceptation du risque » évoqué plus haut c’est effectivement ce qui se passe en général…Mais là il me faudrait du temps et de l’espace pour expliquer. Tenons nous en donc aux principes généraux décrits ci-dessus en se réservant la possibilité d’actionner l’article 1384 alinéa 1 selon les circonstances.
ESA cyclo : quelles préconisations pour éviter cette situation ?
Dominique : d’abord souscrire une garantie à titre individuel dans le cadre de la licence couvrant les dommages subis au vélo quelque soient les circonstances. C’est une garantie tous risques au fond.
ESA cyclo : peux tu être plus précis ?
Dominique : il y a différentes formules avec la licence. Pour les dommages matériels : le petit braquet ne couvre que les dommages au casque 80 € et au cardio-fréquencemètre 100 €. Pour obtenir un dédommagement sur le bris du matériel entre autre, le vélo endommagé lors d’une chute ou accrochage, il faut souscrire impérativement à la formule grand braquet qui est elle-même limitée à 1525 € par événement avec une franchise de 80€ . Surcoût environ de 30€ sur le prix de la licence.
ESA cyclo : et pour les dommages corporels ?
Dominique : c’est l’organisme social de base (sécu) qui prend en charge les frais de soin avec la complémentaire personnelle et celle de la licence. Au-delà s’il y a des séquelles physiques permanentes seule la garantie souscrite dans le cadre de la licence permet de bénéficier d’une indemnité sous forme de capital plus ou moins important selon la formule choisie.
Un petit conseil pour être tranquille, surtout si vous êtes en activité professionnelle, prenez une garantie des accidents de la vie (GAV) auprès de votre assureur. Les montants de garanties sont nettement supérieurs en cas d’accident corporel grave. Le contrat couvre souvent en plus tous les membres de la famille et la cotisation n’est pas très élevée.
ESA cyclo : merci pour cet effort de clarté. Ta dernière recommandation serait laquelle ?
Dominique : afin d’étudier chaque cas précis et pour éviter tout litige entre deux membres du club lors d’une chute ou d’un dommage occasionné par une manœuvre jugée dangereuse, je recommande que les antagonistes se retrouvent de suite autour d’une table au sein du club avec des personnes compétentes en « assurance » (Dominique et Ludovic en particulier voire le responsable de la sécurité) pour étudier au mieux la situation et prendre les mesures conservatoires qui s’imposent de suite.
Ceci sera d’autant plus efficace si la RC d’un tiers hors du groupe peut être recherchée.